Le taureau qui rentre dans une arène est seulement un bovin… pas un fauve ni un animal sauvage

Lors des débats sur l’abolition des corridas au Parlement de Catalogne, l’éthologue Jordi Casamitjana a présenté au Parlement Catalan une étude scientifique du comportement des bovins qui fait s’effondrer les principaux argumentaires des aficionados.

Science : le taureau est un être sensible à la torture des corridas

Ethologie : signifie étymologiquement « science des mœurs ». Il s’agit de l’étude objective et scientifique du comportement animal tel qu’il peut être observé chez l’animal sauvage en milieu naturel, chez l’animal sauvage en captivité, chez l’animal domestique en milieu naturel et chez l’animal domestique en captivité.

Voici le discours de l’éthologue Jordi Casamitjana au Parlement de Catalogne, le 3 mars 2010

Le comportement des taureaux dans la corrida

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les députés, les organisations, et le public,

Le but de ma participation à ces sessions sera d’aider à apporter un étayage scientifique à la motion visant à interdire les corridas. De manière spécifique, ma contribution concernera le champ de l’éthologie, la science qui traite de l’étude comparative du comportement animal.
Quand un gouvernement envisage la possibilité d’interdire une activité qui comporte l’existence possible de sérieux problèmes concernant le bien-être animal, l’opinion des éthologues est très pertinente.
Dans ces cas, la question que les politiciens devraient poser aux éthologues est : en observant le comportement des animaux en question et en le comparant avec le comportement d’autres animaux, est-il possible d’arriver à la conclusion que de tels animaux souffrent d’un point de vue individuel et ou d’un point de vue collectif ? Je répondrai à cette question au cours de mon intervention.

I – De nos jours, nous savons qu’il y a trois types de souffrance animale : physiologique, neurologique et psychologique. La première est créée quand il y a une maladie physique, la seconde quand il y a douleur, et la troisième quand il y a un état de stress, de dépression ou de maladie mentale. Nous, les éthologues, pouvons détecter ce type de souffrance grâce aux outils qui sont nôtres : expressions faciales, vocalisations, langage du corps et comportement en relation avec l’environnement. J’ai utilisé ces quatre outils quand j’ai observé les taureaux.
I.1 – Les expressions faciales sont beaucoup plus utiles en ce qui concerne les « espèces sociales » chez lesquelles la vision est le sens le plus développé, comme c’est le cas des primates.

Un taureau ensanglanté dans les arènesQuant aux taureaux qui sont une espèce de l’ordre des artiodactiles, quoiqu’ils soient vraiment « sociaux », leur sens de la vision n’est pas très développé, c’est pourquoi ils ont moins d’expressions faciales. Néanmoins, quand j’ai observé en détail les enregistrements de corridas auxquelles j’avais assisté, j’ai trouvé des expressions de douleur (gueule ouverte, yeux fermés, etc…) spécialement lorsqu’ils sont transpercés par les armes (pique, banderille, puya).
Mais il y a une expression faciale qui peut être observée chez tous les taureaux au cours des corridas, qui indique une souffrance physique. Vers la fin de la corrida, dans le troisième tercio, on peut voir le taureau la gueule béante et la langue pendante. C’est l’expression faciale de l’épuisement qui montre que la physiologie de l’animal a des difficultés pour garder la température de son corps suffisamment froide afin d’éviter qu’il s’effondre. La famille des bovidés à laquelle appartiennent les taureaux n’ont pas vraiment de mécanisme très efficace pour réduire la température du corps quand il est en hyperthermie, ils ne transpirent pas beaucoup comme les chevaux et n’ont pas une très longue langue pour évacuer la chaleur comme les canidés (chiens ou loups). En d’autres termes, si on considère leur masse corporelle et leurs mécanismes de contrôle de la température, les bovidés s’épuisent très rapidement. Ce handicap est utilisé par les prédateurs naturels tels que les loups qui ont une endurance physique bien plus grande, et dans notre cas les toreros qui utilisent les deux premiers tercios pour épuiser le taureau.
I.2 – Comme l’ouïe est effectivement un sens développé chez les artiodactyles (étant donné qu’ils sont souvent la proie de prédateurs et c’est donc un sens utile pour se défendre), chez ceux qui sont « sociaux » comme c’est le cas du bétail, on pourrait s’attendre à des beuglements exprimant la souffrance. C’est précisément ce que j’ai trouvé.
Les beuglements qu’on entend pendant une corrida expriment clairement que le taureau est en situation de danger qu’il essaie d’éviter, ce qui est précisément la signification biologique et évolutive de la souffrance.
Clairement les mugissements apparaissent seulement quand le taureau s’est séparé de ses collègues de troupeau, et il qu’il fait front à une situation de danger qui peut être un environnement hostile ou inconnu, ou la provocation des hommes ou des chevaux.

Comme le taureau est un animal social, le message des mugissements est destiné à ses collègues de troupeau (les autres taureaux qui ont voyagé avec lui jusqu’aux arènes depuis le pâturage, et dont le taureau peut encore percevoir l’odeur parce qu’ils sont proches), et il peut signifier aussi bien un message d’alerte (par exemple « ne venez pas ici parce qu’il y a un danger »), ou, plus probable, un appel à l’aide (par exemple « venez m’aider, je suis attaqué »).
Sans se préoccuper de leur signification précise, les mugissements informent d’une situation de danger que le taureau essaie d’éviter, et comme le résultat de ces vocalisations est un échec (d’autres taureaux ne viennent pas l’aider et la situation ne s’améliore pas), la frustration, ajoutée à la situation de danger elle-même, nous permet de conclure que ces vocalisations, quand elles ont lieu dans l’arène, sont une expression de souffrance.
I.3 – Le troisième outil éthologique, le langage corporel, nous amène à conclure aussi que le taureau souffre.
Cet outil analyse la position relative des différentes extrémités et des parties de corps les unes par rapport aux autres. En d’autres mots, les postures des animaux. Il y a une posture dans laquelle le taureau tourne la tête vers son dos. Cela se passe quand on vient de planter les banderilles ou l’épée. La fonction de cette posture est clairement d’essayer de sortir avec ses cornes ce qui lui produit une douleur. Cette interprétation est renforcée par l’autre comportement qui consiste à sauter et à bouger furieusement de haut en bas parce que nous savons que le taureau a beaucoup de récepteurs de la douleur dans la zone où sont plantées ces armes.
I.4 – Le quatrième et dernier outil éthologique est le comportement du taureau en relation avec son environnement.
Taureau tentant de fuir l'arèneSi un animal se trouve dans un environnement qui génère une souffrance, sa réponse comportementale sera ou bien d’essayer de changer d’environnement, en fuyant, ou bien de le modifier en éliminant les aspects de celui-ci qui sont la cause de la souffrance. C’est précisément ce que fait le taureau de combat. Il y a quelques cas documentés dont j’ai aussi été le témoin direct, qui montrent que si la possibilité de fuir de l’arène est donnée au taureau, il choisit de fuir. L’arène est précisément conçue pour ne lui pas donner cette possibilité. C’est pourquoi la porte du toril, d’où le taureau est sorti pour entrer dans l’arène, est camouflée par le reste de l’arène, et le taureau ne la voit pas une fois qu’elle est fermée. C’est pourquoi l’arène est circulaire, afin que le taureau perde son orientation et ne puisse se refugier dans un coin (comme il avait l’habitude de faire quand les arènes étaient carrées). C’est pourquoi la clôture en bois (las tablas) est très haute. Cependant, le désir d’échapper est si grand que quelques taureaux sautent par dessus la clôture, ils ne reviennent dans l’arène que lorsqu’ils y sont contraints par une plus grande douleur que celle qu’ils éprouvaient quand ils s’y trouvaient.
Etant donné que la possibilité de fuir n’est pas normalement donnée au taureau, la seule option qui lui reste est de modifier l’environnement en éliminant les aspects de celui-ci qui sont la cause de sa souffrance. Dans ce cas : les toreros et les chevaux. La charge des taureaux, souvent interprétée de façon erronée comme une attaque, est en réalité un comportement défensif destiné à écarter l’agresseur de l’environnement dans lequel se trouve le taureau.

Parfois, instinctivement, le taureau « avertit » avec une charge ritualisée qui correspond à ce que les éthologues décrivent comme « un comportement ambivalent ». Le taureau, sans changer de place, et en respirant bruyamment, gratte le sol avec ses pattes de devant, tête baissée, en direction de l’élément de l’environnement qu’il essaie de modifier (le torero ou le cheval). C’est ce que les aficionados appellent « escarbar ». Il s’agit d’une menace ritualisée réalisée dans l’espoir qu’un affrontement physique sera ainsi évité. Comme les chevaux ou les humains ne disparaissent pas avec ce comportement, il ne reste plus au taureau d’autre remède que de charger, en essayant d’écarter directement le danger avec ses cornes. Ce comportement est celui que le torero veut créer, et il ne cessera de provoquer le taureau jusqu’à ce qu’il se produise (et quand ça arrive, il « trompe » le taureau en lui faisant croire que c’est la capote ou la muleta qui le menace). Donc, la charge des taureaux dans l’arène est un comportement de défense qui indique que le taureau souffre, tant psychologiquement que physiquement. Psychologiquement déjà depuis le début de la course, puisqu’en plus de la peur éprouvée en se trouvant dans un lieu entouré de gens qui crient et où il ne peut ni fuir ni se cacher (ce qui est spécialement négatif dans le cas des taureaux de combat qui ont été élevés dans des conditions où ils avaient peu de contact humain et peu de restriction physique), nous devons ajouter le stress causé par le transport, la séparation du reste de troupeau, et la situation de confinement extrême dans les espaces où on met le taureau immédiatement avant de le laisser sortir dans l’arène.

On trouve la confirmation que la charge du taureau est un mécanisme de défense quand nous comparons le comportement du taureau de combat au comportement d’autres animaux en situations similaires. Par exemple, nous avons le cas des cerfs, qui appartiennent aussi à l’ordre artiodactyles et qui, bien qu’ils appartiennent à une autre famille (les Cervidés) ont aussi le problème de s’épuiser rapidement à cause de l’hyperthermie. Quand des cerfs sont chassés par des loups, ou aussi quand ils sont chassés par des humains, comme dans le cas de la chasse à courre – qui était très traditionnelle en Angleterre mais qui a été interdite en 2004 ainsi que la chasse au renard et la chasse au lièvre – leur comportement de défense est divisé en deux phases. D’abord, en courant pour essayer d’échapper au prédateur. Ensuite, quand ils sont déjà épuisés et qu’ils ne peuvent plus courir, en se retournant pour essayer de charger les chiens ou les loups avec ses bois, parfois avec assez de succès en les blessant mettant ainsi fin à la poursuite. Les chasseurs anglais appellent cette deuxième phase « stag at bay » qui peut se traduire par « cerf aux abois », et c’est quand le chasseur s’approche avec un fusil et tire sur le cerf. Par conséquent, ce que nous voyons dans les courses de taureaux est l’équivalent du « taureau aux abois », la dernière phase de défense qui se manifeste comme un dernier recours quand le taureau n’a plus d’autre option.

En fait, dans le passé nous pouvions voir tout le processus défensif complet, puisque autrefois les taureaux n’étaient pas transportés à l’arène dans des véhicules, mais on les faisait « fuir » vers l’arène avec les « encierros » (la première phase de défense), et alors on les séparait et on les tuait lors de la course de taureaux où le taureau charge les attaquants (la deuxième phase de défense). Précisément comme on peut le voir encore aujourd’hui à Pampelune.

Donc, à partir du point de vue éthologique, je n’ai pas de doute sur le fait que tous les taureaux souffrent en tant qu’individus dans la corrida, et qu’il n’existe pas de modification des pratiques actuelles dans l’arène qui puisse totalement éliminer cette souffrance.

II – Cela nous laisse avec la deuxième partie de question initiale : les taureaux souffrent-ils d’un point de vue collectif ? Pour répondre à cette question nous devons vérifier ce que signifie le groupe des « taureaux ».
Pour cela nous devons voir quelle est la catégorie taxinomique du taureau de combat. C’est un sujet encore débattu dans la communauté scientifique, qui ne semble pas être d’accord sur la classification précise de ces animaux, mais il y a un consensus concernant leur appartenance à l’Ordre des Artiodactyles, à la Famille des Bovidés, à la Sous-famille des Bovinés, et au genre Bos. Les divergences commencent au niveau de l’espèce, de la sous-espèce, de la race, de la variété, etc… Aujourd’hui la majorité des hommes de science s’accordent pour dire que le taureau de combat appartient ou à l’espèce Bos taurus ou à Bos primigenius, et la sous-espèce Bos taurus taurus ou Bos primigenius taurus, selon l’espèce qui est acceptée. Mais il est important de souligner que tous les taureaux domestiques occidentaux, tant ceux de combat que ceux élevés pour leur viande, appartiennent à ces sous-espèces, donc nous devons aller encore plus en bas dans le classement pour trouver les taureaux de combat. C’est à ce niveau que les opinions divergent concernant la race ou la variété à laquelle ils appartiennent. Il n’y a même pas d’accord pour affirmer que tous les taureaux de combat forment une race à part. Par conséquent, l’unique chose que nous pouvons dire avec assurance de la « catégorie » des taureaux de combat consiste en ce que c’est un groupe de bovins domestiques créés par l’homme par des sélections artificielles (comme tous les taureaux qui existent dans le monde aujourd’hui) et qui sont utilisés dans la tauromachie.

Un groupe de taureau dans leur parcPar conséquent il n’y a pas de doute : les taureaux de combat ne sont pas une espèce, ni une sous-espèce, et ils sont un produit de l’activité humaine, non de la nature. Cela est important parce qu’un des problèmes possibles d’une « catégorie » d’animaux est le danger d’extinction, mais celui-ci ne peut s’appliquer aux taureaux de combat puisque c’est un concept qui ne peut seulement s’appliquer qu’aux sous-espèces, aux espèces, et d’autres taxons supérieurs. Ayant ceci à l’esprit, étant donné que l’espèce à laquelle le taureau de combat appartient a actuellement plus de 1300 millions d’individus dans le monde, dont seule une minorité est utilisée dans des activités taurines, le danger d’extinction, avec ou sans tauromachie, n’est pas l’un des problèmes du taureau de combat.

Ce qui peut également poser problème pour un collectif animal, c’est la longévité. Si une population d’animaux a sa longévité moyenne considérablement réduite par un motif quelconque, cela affecte sa capacité à se reproduire, et on pourrait dire que la population « souffre » d’un problème démographique. Ce qui est certainement un sujet applicable au taureau de combat, puisque la longévité des individus sélectionnés pour les courses de taureaux reste radicalement réduite au moins à un tiers de la longévité qu’ils pourraient avoir. Les taureaux de combat sont tués quand ils ont trois, quatre, cinq ou comme beaucoup, six ans d’âge, mais si la tauromachie n’existait pas ces individus pourraient vivre vingt ans ou plus. En fait, la longévité moyenne des mâles de l’espèce à laquelle les taureaux appartiennent est de vingt ans en captivité.

Cette réduction artificielle de longévité a une autre conséquence pour la catégorie des taureaux de combat. Il a un effet négatif sur la structure sociale des groupes. Toute espèce sociale assume son équilibre social dans une combinaison spécifique de membres d’âges et de genres différent. Si un groupe démographique spécifique est systématiquement éliminé, comme c’est le cas des mâles de plus de six ans, le groupe ne peut pas obtenir la stabilité sociale idéale et il est toujours dans une situation constante de réajustement, ce qui explique pourquoi il y a parfois beaucoup de bagarres entre des mâles dans le pâturage. Ces bagarres font que les éleveurs séparent les mâles du groupe, ce qui n’aide pas toujours à générer une stabilité. Ajouté à cela, comme au terme de générations de sélection artificielle, les éleveurs de taureaux de combat ont essayé de créer des individus qui ont plus tendance à se défendre en chargeant qu’en courant, cela a généré une réponse inadéquate et non naturelle aux confrontations entre les mâles, pour les femelles ou par dominance : ou bien ceci crée plus de bagarres et de blessures entre des individus (une souffrance physique), ou bien ceci oblige les éleveurs à séparer plus de groupes (une souffrance sociale).

En conclusion, d’un point de vue éthologique et zoologique je n’ai aucun de doute sur le fait que les taureaux de combat souffrent individuellement et collectivement pendant la corrida, et c’est pourquoi l’interdiction de ces activités est l’action la plus cohérente qu’une société – à qui importe le bien-être animal et qui valorise le patrimoine naturel- puisse faire.

Merci beaucoup Madame la Présidente, et Mesdames et Messieurs les députés.

Jordi Casamitjana
Ethologue
Animal Protection Consultancy
info@animal-protection-consult.com
www.animal-protection-consult.com
Tel : +44 (0) 7515 797470
London, UK.

Le Dalaï Lama soutient la lutte pour l’abolition de la corrida

La lettre du Dalaï Lama adressée à l’association ADDA (Asociación Defensa Derechos Animal, Espagne)

“Sa Sainteté le Dalaï Lama considère d’une façon évidente que la corrida est une pratique cruelle qui inflige publiquement d’atroces souffrances à des animaux conscients et innocents.
En conséquence le Dalaï Lama apporte son soutien à l’ Initiative Législative Populaire (ILP) initiée par des ONG et des citoyens catalans pour bannir la corrida hors de la Catalogne et invite le Parlement catalan à voter en faveur de l’amendement de l’article 6.2a de la Loi Catalane de Protection Animale et à abolir ainsi, définitivement l’exception qui autorise la corrida.”

A Dharamsala, Inde
le 02 février 2010

La lettre du Dalaï Lama adressée aux associations françaises qui luttent contre la torture animale.

«Aujourd’hui, alors qu’on assiste à une montée en puissance de la reconnaissance des Droits de l’Homme, il y a, au niveau mondial, une prise de conscience de plus en plus grande d’un besoin pour une protection, non seulement de l’environnement, mais aussi des animaux et une prise en compte de leurs droits.

Malheureusement, il y a encore des gens qui, non seulement n’acceptent pas cette idée, mais qui considèrent que c’est un plaisir de chasser et de combattre des animaux jusqu’à la mort douloureuse de ces animaux.

Cela semble en contradiction avec l’esprit d’équanimité qui est en train de se développer de nos jours dans les sociétés.

Je suis intimement persuadé que les êtres humains sont par nature fondamentalement bons, et je pense que nous devrions non seulement maintenir des relations affables et paisibles avec nos congénères mais qu’il est très important d’étendre la même sorte de sollicitude à l’environnement et aux animaux qui vivent naturellement en harmonie avec ce dernier.
Quand j’étais adolescent, étudiant le Bouddhisme au Tibet, il m’a été inculqué qu’il était important d’adopter un comportement consistant à se soucier d’autrui.
Une telle pratique de la non-violence s’applique à tous les êtres sensibles, à tout être vivant qui possède un esprit comme nous le reconnaissons dans le Bouddhisme. Et là où il y a un esprit, il y a des sensations telles que la peine, le plaisir et la joie.
Aucun être sensible ne cherche la souffrance, bien au contraire, tous recherchent le bonheur.
Comme nous partageons avec eux ces mêmes sensations de base, nous, en tant qu’êtres humains rationnels, avons l’obligation de contribuer, dans toute la mesure du possible, au bonheur des autres espèces et de faire de notre mieux pour soulager leurs peurs et leurs souffrances.

C’est pourquoi je suis heureux d’apporter mon soutien à l’Association française de Protection Animale qui lutte contre la corrida »

Antonio MORENO : Confession d’un aficionado andalou

Comment naît-on taurin ? Comment devient on taurin ? Comment fabrique t’on un aficionado ?

par Antonio MORENO (élevé dans la plus pure tradition taurine andalouse)

Dès ma plus tendre enfance, mes parents, aficionados taurins, m’ont emmené à toutes les corridas qui avaient lieu dans ma ville, Malaga, et alors que je n’étais qu’un petit garçon de 7 ans, j’ai même participé à plusieurs films tournés à Malaga sur le célèbre torero de l’époque, Manuel Benítez el Cordobés.

Deux ans plus tard, mon père affichait sa fierté d’avoir un fils qui, si jeune, connaissait toutes les passes de muleta (1) et de cape, ainsi que le nom des taureaux selon leur couleur, leurs cornes ou leur physionomie.

Pendant des années, la tauromachie a fait partie de ma vie, j’accompagnais mon père dans d’autres villes et d’autres arènes, j’assistais à des fêtes taurines ou encore à des corridas de bienfaisance.

J’étais littéralement passionné, tout comme par le football, la natation, la pêche ou la chasse. C’était un mélange d’habitudes acquises, ou plutôt imposées, qui ont forgé mon caractère et mon obsession pour ce que l’on appelait la « Fiesta ».

Nous nous asseyions toujours derrière la barrière, c’est-à-dire au premier rang, quelles que fussent les arènes, toujours à l’ombre, mon père cigare à la bouche, ma mère mantille posée à même la barrière, le rituel classique d’un après-midi de corrida.

L’atmosphère de la corrida est envoûtante, elle transforme la réalité mentale, tout commence…

Dès que vous entrez dans une arène, vous êtes ébloui par les couleurs, la lumière, les reflets du sable.

Le paseíllo (2), ce fameux moment où les habits de lumière brillent comme jamais, où tous défilent dans un groupe bien ordonné, les alguazils à cheval ouvrant le cortège ; la musique s’empare alors de vos sens, tout est prêt pour faire de vous le spectateur, l’aficionado, le complice de cette « fiesta ».

On m’a appris que le torero jouait sa vie face à ce fauve, qu’il devait l’apprivoiser, l’humilier pour l’obliger à suivre la cape, coûte que coûte.

Le Cheval, l’autre protagoniste, était un autre membre gentil de la corrida que le Taureau tenterait de projeter au sol, pauvre cheval, attaqué par cette bête noire sans scrupule, ce Taureau était méchant, il méritait bien la puya (3) que le picador lui plantait ; il devait pousser plus, il devait faire en sorte de fatiguer le Taureau qui devait finir exténué d’avoir poussé ce pauvre Cheval.

Les banderilles, et ces braves hommes sans cape pour se défendre, rien que ces bâtons ; la peur envahissait les gradins, les cœurs se serraient, et une fois les banderilles posées, courir, cette bête noire courait et courait après le banderillero (4) ; heureusement, un torero distrayait le Taureau avec sa cape, le quite (5) était parfait.

Voilà la réalité que voit un enfant, le Méchant Taureau et les autres protagonistes du Combat, les Gentils. Une fois que cette idée est inculquée à un enfant, elle ne le quitte plus, il est déjà pris au piège de la fausseté d’une corrida.

J’ai vu mourir des centaines de Taureaux, j’ai vu de multiples encornades de toreros, de subalternes, des chevaux morts dans l’arène et des centaines d’anecdotes cruelles, cependant je ne suis pas venu raconter des détails isolés mais un ensemble de réalités.

Pendant des années, mon esprit a été fermé à une réalité, celle du Taureau.

J’ai vu des Taureaux s’enfuir vers le chiquero (6), reconnaissant que c’était par là qu’ils étaient entrés, ils voulaient s’échapper, ils ne savaient pas pourquoi ils étaient là.

J’ai vu des Taureaux encorner des toreros et ne pas persévérer dans leur charge, ils voulaient juste qu’on les laisse tranquilles, qu’on arrête de leur faire du mal.

J’ai vu beaucoup de Taureaux pleurer, mugir de douleur, de vrais cris qui aujourd’hui me feraient dresser les cheveux sur la tête, mais ces manifestations n’étaient alors pour moi que la preuve de leur manque de caste, de leur lâcheté.

J’assistais à trois mises à mort, et à l’entracte, je buvais, mangeais même, et riais de la mort de ces êtres.

Je ne comprends pas comment on peut manger après avoir vu cela, mais ce qui est certain c’est que je le faisais, et que je me sentais bien.

Petit, j’ai été un enfant agressif, j’avais un chien, mon chien, mais le reste du monde animal était bon à sacrifier ; le respect était perdu, mon père m’emmenait à la chasse, pour tuer, à la pêche, pour tuer, et j’avais l’impression d’être heureux, je devenais un homme utile, dur, sans compassion envers les autres animaux, et dur, dur envers ceux de ma propre espèce.

Comment un taurin voit-il le taureau pour la 1ère fois comme un animal qui souffre ?

Les années ont passé,bien des années, jusqu’à ce qu’un jour, alors que j’avais un peu plus de 30 ans, au cours d’une corrida de la Feria de Malaga, subitement, sans prévenir, il s’est passé quelque chose avec un deuxième Taureau de cet après-midi-là ; un Taureau est apparu derrière une cape, j’ai été sidéré, j’ai fixé cet Animal que je n’avais jamais vu, moi qui pouvais avoir vu des milliers de Taureaux mourir sous mes yeux, mais ce jour-là, il s’est passé quelque chose, rien de spécial dans les faits ; le seul à être spécial ce jour-là c’était moi qui, pour la première fois en trente et quelques années, je “voyais” un TAUREAU.

Je me suis levé de mon siège, et sans dire un mot à personne, j’ai quitté l’arène, et depuis lors, je n’en ai plus jamais foulé une seule.

Je ne suis pas devenu anti-taurin, non, je suis simplement devenu indifférent aux corridas. Pendant des années, je savais ce qui se passait entre les murs des arènes mais je ne ressentais rien, cela m’était égal, quand on me demandait si j’aimais les spectacles de taureaux, je répondais toujours la même chose : oui, dans mon assiette, avec des pommes de terre.

Comment une personne indifférente se lance-telle un jour dans le combat contre ses origines ?

Plus de 10 ans ont dû passer avant qu’un jour je me dise qu’il fallait mettre un terme à tout cela. J’ai analysé les raisons de cette tradition lamentable, j’ai eu honte d’avoir emmené ma fille aînée à plusieurs corridas ; heureusement, elle n’a jamais aimé cela, et je me suis réjoui de n’y avoir jamais emmené les plus petits.

Un jour je me suis dit, « je dois faire quelque chose » et depuis, je me bats pour faire connaître ma vérité sur les sanglantes corridas.

On ne peut pas prendre du plaisir face à la souffrance d’un Animal, une corrida ce n’est que l’HUMILIATION, la TORTURE et la MORT d’un ANIMAL INNOCENT pour le plaisir d’un groupe de SADIQUES.

J’ai pensé à tous ces enfants qui, comme moi, ont été élevés dans cette ambiance misérable et qui, sûrement, n’auront pas la chance que j’ai eue de VOIR LE TAUREAU.

C’est pourquoi je raconte mon histoire là où je peux le faire, je n’ai pas honte, je me pose comme un simple exemple : SI MOI J’AI PU CHANGER, VOUS LE POUVEZ AUSSI.

Je sais ce que l’on vit dans une arène, ce que je demande, c’est qu’un jour, ceux qui les fréquentent vivent ce que l’on ressent de l’extérieur.

Il y a maintenant plus d’un an que je donne des conférences dans toutes sortes d’écoles afin d’y porter le message du respect de tout être vivant. L’Éducation doit être le pilier sur lequel nous devons tous nous appuyer, c’est l’avenir d’un présent encourageant. Les enfants d’aujourd’hui n’acceptent pas nos traditions cruelles et la plupart d’entre eux répudient la corrida : ces enfants-là ne sont pas l’avenir, ils sont ce PRÉSENT que nous attendions avec ferveur.

Aujourd’hui, je porte également un message de respect envers tous les êtres vivants, humains et non humains, et je demande à tous ceux qui luttent pour l’Abolition de la tauromachie de ne jamais, au grand jamais, dire qu’ils se réjouissent qu’un torero ait été encorné, parce que notre respect est et sera toujours le respect de tout type de vie.

Ce combat pour le respect des animaux m’a conduit il y a quelques années à adopter un régime VÉGÉTALIEN, car je ne conçois pas de défendre la vie des Animaux et de les avoir ensuite à l’état de cadavres dans mon assiette.

Les gouvernements et l’Église face à la corrida

Ce qui me fait le plus mal dans tout cela, c’est que cette situation soit entretenue avec l’argent public, avec l’argent de tous les citoyens, qu’ils soient pour ou contre. Les gouvernements, et dans mon cas le Gouvernement espagnol, favorise, parraine et encourage la participation à ces spectacles sanglants, et de plus, cautionne le fait qu’on inculque aux enfants, ces esprits sains, la banalisation de la Maltraitance Animale dès leur plus jeune âge.

Mais il n’y a pas que le soutien des Gouvernements ; le monde de la corrida affiche son soutien et son attachement à l’Eglise Catholique.

Il est en effet très rare de trouver en Espagne une corrida qui ne soit célébrée au nom d’un Saint, d’une Vierge ou d’un Christ ; autrement dit, l’humiliation, la torture et la mort d’un animal, au nom de Dieu.

Bulle Papale

Il convient de rappeler ici que l’Eglise a condamné ces spectacles sanglants et honteux, non pas d’hommes mais du démon.

Cela s’est passé le 1er novembre 1567 lorsque le Pape Pie V a publié la Bulle DE SALUTIS GREGIS DOMINICI, interdisant formellement et définitivement les corridas de Taureaux et décrétant la peine d’excommunication immédiate contre tout Catholique qui les autoriserait ou y participerait. Cette Bulle ordonnait également le refus d’une sépulture religieuse aux Catholiques qui pourraient mourir des suites d’une participation à tout spectacle taurin.

Par la suite, des dispositions papales ont modifié le contenu de cette Bulle par le biais de dérogations et d’annulations partielles, mais ont toujours exigé que deux conditions soient respectées :

Que les corridas n’aient pas lieu les jours de festivité et qu’au cours de leur déroulement, des mesures soient prises pour éviter, autant que possible, tout décès de personne. En cas de non-respect de l’une de ces conditions, et dans tous les cas pour les moines, les frères mendiants et les religieux réguliers de tous ordres, la Bulle est toujours en vigueur et est applicable aux croyants catholiques qui, en connaissance de cause, ne la respecteraient pas.

C’est pour toutes ces raisons que J’ACCUSE les Gouvernements d’autoriser la souffrance inutile du Taureau, ainsi que l’Eglise qui consent à la participation de ses fidèles à ces spectacles sanglants.

J’accuse le Gouvernement de l’Espagne de permettre que l’on trompe les enfants en leur montrant que la torture d’un animal est justifiée dans le cadre d’un acte de divertissement.

De continuer à subventionner un spectacle privé avec l’argent public, et de manquer de toute morale humaine dans l’attribution de ces subventions, les Pouvoirs publics privilégiant ce choix budgétaire au lieu de couvrir les besoins réels de la population espagnole.

J’accuse l’Eglise qui accorde sa bénédiction au nom de ses Divinités et qui utilise le nom de Dieu en vain.

Et moi- même, d’avoir pris part à ce divertissement infernal.

Je demande Justice, non pas pour moi, mais pour la vie de la plus principale victime, le Taureau.

Antonio V. Moreno Abolafio

Président du Collectif Andalou Contre la Maltraitance Animale.

Andalousie – Espagne

http ://www.cacma.org

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1 : La muleta est le leurre de tissu rouge utilisé par le matador lors du dernier tiers de la corrida.

2 : Le paseíllo, ou paseo, désigne le défilé des matadors et de leurs cuadrillas, au début de chaque corrida.

3. : La puya est la pointe tranchante située à l’extrémité de la pique des picadors.

4. : Le banderillero est chargé de planter les banderilles.

5. : Le terme quite désigne l’intervention d’un ou plusieurs toreros pour détourner la charge du taureau d’un
autre intervenant en danger.

6. : Le chiquero est la partie du toril dans laquelle est enfermé le taureau avant d’être lâché dans l’arène.

David Douillet, Ex champion judoka, amateur de torture animale dans des arènes !

David Douillet participant à une séance de torture animale dans les arènes de DAX (40)

(Photo vue dans http :// terrestaurines.com) Le voici, dans le callejón, la zone des spécialistes et des invités de marque, congratulant le tueur de taureaux qui venait de trucider et massacrer publiquement un animal.

Cette image surprendra beaucoup de ses admirateurs qui pensent que le respect des êtres vivants doit être l’une des valeurs d’un sportif de haut niveau, valeur qui est étrangère à la tauromachie ibérique qui ne connaît que l’irrespect des êtres vivants, la manipulation, le mensonge, la barbarie et la mort…

Nous recommandons à David Douillet de lire la Confession d’un aficionado andalou

Qui ne connaît pas David Douillet ? David Douillet le sportif de haut niveau, double champion olympique en 1996 et 2000, qui a également remporté quatre titres mondiaux et une couronne européenne ? Tout le monde le connaît ! Mais qui connaît le David Douillet amateur de torture animale dans des arènes ? Personne ou presque…

Après son parcours sportif, il s’est reconverti depuis en homme d’affaires, puis en consultant sportif pour Canal+. Depuis 2009, la politique l’intéresse et il devient membre du bureau exécutif de l’UMP en charge des sports. Il est maintenant candidat UMP à l’ élection législative partielle des 11 et 18 octobre dans la douzième circonscription des Yvelines.

Nous sommes étonnés qu’après un parcours sportif aussi exceptionnel, et après sa généreuse participation à l’action “Pièces jaunes” de Bernadette Chirac, David Douillet puisse se montrer dans le temple de la maltraitance et de la torture animale que sont les arènes de DAX et cautionner par sa seule présence ceux qui érigent en spectacle ce qui n’est en réalité que la torture d’animaux en public. Peut-être que, suivant les conseils des ses “amis” politiques participants au groupe parlementaire d’études sur la tauromachie dont Jean Grenet est le président, pense t’il que pour gagner des voix il faut se montrer dans une arène. C’est un choix malheureux…

Nous regrettons l’élimination lors du premier tour de cette élection d’Alain Lipietz, seul candidat à avoir signé notre manifeste pour l’interdiction de l’entrée des arènes aux mineurs de moins de 16 ans, et à s’être vivement opposé aux corridas..

Écrivez nombreux à David Douillet pour lui faire part de votre surprise et de votre déception de voir un sportif de haut niveau comme il a été, prendre du plaisir à regarder une mascarade de combat entre une équipe de professionnels de la maltraitance animale et un herbivore sorti de son milieu naturel et lui demander de préciser sa position réelle vis à vis de cette torture animale dans les arènes : ddouillet@assemblee-nationale.fr

Nous reprenons ci-dessous les mots de Walter Spanghero, qui lui aussi a été un grand sportif, et qui s’est insurgé contre l’amalgame du rugby et de la corrida qui a été fait par des aficionados inconséquents :

 

Le rugby [tout comme le judo] est un sport de combat avec un respect ô combien sincère de l’adversaire. La corrida est une confrontation inégale entre une personne et un taureau qui tombe dans un piège, de ce duel il ne sort jamais vainqueur, car pour arriver a ses fins l’homme affaiblit l’animal à coups de piques et lui sectionne les veines. Quelle lâcheté ! !

Merci à Walter Spanghero pour sa clairvoyance et son humanité.

Collectif de professionnels soutenant la motion de demande d’interdiction des corridas aux moins de seize ans

Jean-Paul RICHIER, Psychiatre, Praticien Hospitalier, est responsable d’un Collectif de professionnels (psychiatres & psychologues) soutenant la motion de demande d’interdiction des corridas espagnoles et portugaises en France aux moins de seize ans.

Nous sommes à une époque où les débats sur la corrida prennent de l’ampleur dans tous les pays où elle est pratiquée, portés par de profondes mutations à la fois dans le rapport de l’individu contemporain à la violence et dans la relation entre hommes et animaux. Nous sommes aussi à une époque où on se préoccupe de façon croissante de la violence dont les jeunes peuvent être témoins, victimes ou auteurs, cela d’autant que les chiffres des violences aux personnes augmentent en France au fil des années.
Le moment est donc venu de prendre en compte l’impact de ce spectacle sur les enfants et les adolescents.
En effet, il y a dans la corrida une violence et une souffrance qui associent certaines caractéristiques fondamentales :

  • elles sont imposées dans le cadre d’un rapport radicalement inégal, à savoir par des hommes à un animal contraint à être présent ;
  • elles n’ont pas d’utilité concrète, elles ont pour unique raison d’être le plaisir de l’homme ;
  • elles sont constituées en spectacle.

D’une façon générale, il est légitime de redouter chez le jeune spectateur de corridas les conséquences suivantes :

  1. Des effets traumatiques : La réaction normale d’un enfant à la vue d’un animal saignant sous les coups d’un homme est toujours au départ une réaction de rejet, de gêne, et de peur. Certains enfants dans une corrida vont être heurtés par certaines scènes, et pourront d’autant moins en faire part que leur entourage adulte déniera le caractère traumatisant du spectacle en alléguant l’art, la tradition et la culture.
  2. Une accoutumance à la violence : Les adultes qui emmènent des enfants à des corridas les entraînent qu’on le veuille ou non à une forme de violence très crue, réelle et non pas fictive même si elle est circonscrite à l’arène, et pour tout dire la leur enseignent en alléguant l’art, la tradition et la culture.
  3. Une fragilisation du sens moral : On constate abondamment que bien des difficultés dont souffre notre société ont pour racine des incohérences du système de règles de l’individu. Il semble difficile d’apprendre à nos enfants, dans les écoles et dans les familles, que la violence est condamnable et qu’on ne doit pas faire souffrir les autres êtres, mais qu’à côté de cela la violence gratuite peut être légitime voire recommandée et qu’on a le droit de faire souffrir certains êtres en alléguant l’art, la tradition et la culture. L’enfant voit parfaitement que le taureau a été contraint à venir dans l’arène et qu’on lui inflige longuement des blessures puis la mort, sans motif de défense ou de protection. Cela peut déstabiliser les critères du juste et de l’injuste.
  4. Une perturbation des valeurs : Il n’est pas anodin de présenter à des enfants le spectacle de la souffrance, du sang et de la mort en le justifiant par une valeur esthétique, qui primerait donc sur tous les autres aspects, en le légitimant par une tradition, qui devrait donc l’emporter sur tout autre type de considération, en l’associant à une identité culturelle, alors même que l’enfant est en quête de modèles identificatoires. Enfin, il n’est pas anodin de présenter à des enfants le spectacle d’hommes tourmentant, et de plus sans motif, un animal jusqu’à la mort, alors même que notre société est en train de repenser en profondeur nos rapports avec les animaux et avec la nature.

Il va de soi que ces réflexions s’appliquent à plus forte raison à l’entraînement à la pratique de la corrida, notamment dans le cadre de ce qu’on appelle les “écoles taurines“. Ces écoles existent en France à Arles, Nîmes, Béziers ou Cauna (Landes), les enfants peuvent y être admis à 10 ans voire moins, et ne tardent pas à s’exercer sur des veaux.

On ne manquera pas de nous rétorquer que les cahots éducatifs et moraux qui secouent nos sociétés ressortissent à des facteurs causaux bien plus vastes et complexes. Nous en sommes bien entendu conscients, mais ceci ne saurait tenir lieu de réponse à la préoccupation ici exprimée.

En tant que psychiatres et psychologues, nous demandons en conséquence que le spectacle de la corrida, ainsi que l’entraînement à sa pratique, ne soient plus autorisés aux moins de seize ans.

>> Voir le Collectif de professionnels soutenant l’interdiction des corridas aux moins de seize ans.