Je n’étais pas ce qu’il convient d’appeler un aficionado pur et dur, mais pendant plus de dix ans, je suis allé voir des corridas.

Comme beaucoup au départ, je suis allé dans les arènes pour faire comme les autres (et comme les copains)… surtout en période de féria ; car c’est presque « normal » d’aller voir une corrida. Cependant, j’ai souvent eu du mal à supporter la phase des piques ; surtout lorsque celles ci étaient très appuyées, au point que j’étais content lorsque le torero renvoyait les picadors avant qu’ils n’entrent en action. Au fil des années, je devenais sensible à la souffrance du taureau, et troublé par ce que j’appelle aujourd’hui « actes de barbarie ». Malgré cela, j’y assistais encore ; jusqu’au jour où enfin un taureau m’a fait prendre conscience que ce ne sont pas que des « animaux féroces » comme ils sont présentés.

Au cours de cette corrida, le torero réalisait ses passes à l’opposé du toril, et vint enfin la mise à mort ; épée enfoncée jusqu’à la garde. Là, en vacillant et beuglant de douleur, le taureau se dirige vers le toril. Mais c’est un véritable chemin de croix ; son sang coule à flot par sa gueule. Il fait trois, quatre pas, s’arrête, semble réunir ce qu’il lui reste de forces, repart, et ainsi traverse l’arène pour enfin arriver devant la porte du toril et s’affale. J’ai tout de suite quitté l’arène, sans attendre le supplice des trois autres condamnés à mort.

C’était ma dernière corrida.

Bien sûr, chacun peut interpréter cela à sa manière, et pour moi, c’est certain, il a voulu aller mourir près de ses congénères (qui hélas allaient subir le même sort), avec lesquels il avait été « heureux » de vivre.

Je suis un repenti, mais cela ne me gène pas. J’ai longtemps nié l’évidence, mais maintenant je suis en paix avec mon esprit, et j’aime encore plus les taureaux, mais uniquement dans les pâturages.

André.