La corrida créatrice de richesses ?  D’emplois ?

Les abolitionnistes dénoncent régulièrement ce qu’ils présentent comme un mensonge : l’apport économique de la corrida. Par exemple en indiquant que dans de nombreux cas, lorsque les corridas sont organisées dans le cadre de Ferias populaires, ce n’est évidemment pas la corrida qui apporte à la Feria, mais l’inverse. Notamment via les subventions publiques et les facilités offertes par les municipalités aux organisateurs de ces tristes spectacles.

Même si nous luttons principalement contre la barbarie des arènes qui sévit dans le sud de la France, la situation en Espagne (berceau de la corrida) est particulièrement intéressante et riche d’enseignements. Un important dossier consacré à la réalité de la filière tauromachique vient d’être publié par l’AVATMAl (association de vétérinaires opposés à la tauromachie et à la maltraitance animale). Le travail effectué, et les conclusions rendues publiques méritent amplement d’être résumés ici.

Emploi 2En Espagne, de 2007 à 2014, le nombre de « spectacles » tauromachiques (corridas, novilladas, becceradas, « festivals » taurins et apparentés) s’est effondré : 3651 en 2007, 1868 en 2014, soit une baisse de 51 % ! Ce qui n’a pas empêché la mise à mort de 5 324 pauvres bovins dans les arènes l’année passée…

Alors que la logique voudrait que le nombre de d’intervenants professionnels déclarés diminue, c’est exactement l’inverse qui s’est produit sur la même période : 7 397 en 2007, 10 194 en 2014 ! Il est évident que tous ces « professionnels » ne peuvent réellement exercer leur activité, même très ponctuellement…

Sur 810 personnes enregistrées comme « matadors de toros », 623 ne sont intervenues à aucun moment lors d’une corrida en 2014. Plus parlant encore : sur 3018 « novilleros » déclarés, 2984 n’ont même pas foulé le sable des arènes en 2014 (l’étude indique même que plus de 68 % de ces novilleros, logiquement de jeunes toreros débutants, ont en réalité plus de 30 ans…) ! Au final, seuls 8 % de ces professionnels ont eu plus d’un engagement dans l’année écoulée… Quel succès !

Les chiffres concernant l’élevage sont à l’avenant. Sur un total de 1339 exploitations déclarant élever des taureaux destinés à la corrida, 311 seulement ont pu vendre au moins un animal pour une corrida en 2014, c’est à dire 23 %. Les 77 % restant n’ont pas même vendu un seul animal l’année écoulée. En Espagne comme en France, la très grande majorité des taureaux dits de corrida sont en fait destinés principalement à la filière alimentaire et non à la corrida (les chiffres français de sources taurines tournent tous autour d’un maximum de 10 % d’animaux destinés à la tauromachie), anéantissant ainsi l’éternel argument des taurins selon lequel, l’abolition de la corrida génèrerait la disparition du taureau dit de combat.

Au vu de ce rapport, il apparaît évident que la filière de la corrida n’est en rien la source d’emplois et de richesses pour la communauté que le lobby taurin tente de mettre en avant. La très grande majorité des professionnels n’a aucune activité régulière, voire pas d’activité du tout. Maintenue la tête hors de l’eau en Espagne à grands coups de subventions publiques (de la part de l’État, et également de la part de l’Europe), la corrida n’est pas un »plus » pour la société : elle est en réalité une charge supplémentaire, à laquelle s’ajoutent son caractère de plus en plus impopulaire et sa cruauté archaïque…

En France, la situation est-elle plus favorable à la tauromachie ? Le plus petit nombre d’intervenants (toreros ou éleveurs) limite probablement la casse. Mais la mauvaise santé financière des plus importants organisateurs français de corrida ne vient pas relever le bilan général. Au contraire. Pas plus que le fait que dans de nombreux spectacles, notamment les plus importants, les toreros ainsi que les animaux proviennent souvent d’Espagne, ceci réduisant un peu plus encore l’apport économique de la corrida et l’élevage français…

Désinscription du PCI, rejet de la part de la grande majorité des citoyens, recommandation répétées de l’ONU visant à en écarter les enfants ; décidément, les arguments en faveur de cette barbarie s’effondrent l’un après l’autre. Il est grand temps d’en finir…

Nous profitons de la diffusion de cet important rapport de l’AVATMA pour saluer également l’action des vétérinaires abolitionnistes français, réunis au sein du COVAC  (Collectif des Vétérinaires pour l’Abolition de la Corrida). Le COVAC a récemment écrit au Conseil Supérieur de l’Ordre des Vétérinaires pour attirer son attention sur la cruauté de la corrida et sur la honteuse caution apportée par quelques vétérinaires à cette pratique. Le Conseil Supérieur de l’Ordre des Vétérinaires a favorablement accueilli les préoccupations exprimées par le COVAC et a annoncé que la corrida faisait désormais partie des questions que le pôle « profession vétérinaire et éthique animale » du Conseil de l’Ordre va traiter, et qu’un avis sera rendu.

Une fois cet avis rendu, cela signifiera une avancée considérable pour notre cause et la remise en question de l’existence aberrante des vétérinaires taurins…